Toutes les nuances d’Araki

C’est incontestablement l’exposition de ce printemps à Paris: le musée Guimet consacre une rétrospective à l’œuvre immense du photogaphe Nobuyoshi Araki, tour à tour provocante, sulfureuse, bouleversante.

Cinquante ans de travail, plus de 400 photographies: l’exposition que le musée Guimet consacre à Araki est l’une des plus importantes jamais organisées en France. Il a fallu faire un choix parmi les milliers de photographies a réalisées depuis 1965 – Araki, qui n’utilise que des pellicules, en aurait déjà acheté la quantité nécessaire pour en avoir jusqu’à la fin de sa vie. Celui qui aurait déjà publié plus de 500 livres, réalise en effet des photos comme il respire, sans jamais s’arrêter. Elles sont déployées selon un parcours thématique, depuis les séries de fleurs incandescentes jusqu’aux photographies recouvertes de calligraphies et de peintures. Dans chaque image, on retrouve les racines culturelles d’Araki, influencé sans cesse par les arts traditionnels japonais, de l’Ikebana (les fleurs) au Kinbaku (la tradition du bondage, pratiqué depuis le XVe siècle par les samouraïs pour immobiliser un prisonnier)… Des nus, des paysages, des natures mortes, des portraits de sa muse Kaori…  le musée Guimet montre l’œuvre d’un boulimique de la création, de la photographie, de la vie, qui ne s’arrête jamais.

Et puis il y a la sublime série Voyage Sentimental, réalisée en 1971, sorte de journal intime visuel de sa lune de miel avec Yoko, grand amour de sa vie. Ce fut la base de toute son œuvre érotique. La série continue en 1990, à la mort de Yoko (Voyage en hiver): Araki continue de photographier l’agonie de sa femme, son cadavre et ses funérailles, instinctivement. Au visiteur de réaliser alors pourquoi le désir, la vie et la mort, appartiennent finalement à la même dimension, dans toute son œuvre, jusqu’à la série d’images réalisée spécialement pour l’exposition, Tokyo Tombeau : “Tokyo est un cimetière. Ou un parc d’attractions. En fait, je ne sépare pas le paradis de l’enfer. Pour moi, si le paradis n’inclut pas des éléments d’enfer, ce n’est pas le paradis. Par exemple, une femme exempte de tout mal ne m’attire pas. C’est un courant de pensée auquel j’adhère depuis longtemps. C’est pareil pour les fleurs, je photographie celles qui sont en train de se flétris, sans en avoir conscience.“

Araki, jusqu’au 5 septembre 2016 au Musée Guimet, 6 place d’Iéna, 75116 Paris – www.guimet.fr

Toutes les citations d’Araki sont tirées du catalogue de l’exposition, Araki Nobuyoshi, sous la direction de Jérôme Neutres, coédition Gallimard / musée national des arts asiatiques – Guimet. 

04001.jpg Voyage sentimental (Sentimental Journey), 1971, collection de la Maison Européenne de la Photographie, Paris ©Nobuyoshi Araki/Courtesy Taka Ishii Gallery

araki-10001.jpg Imparfait – Futur (Past Tense – Future), 1979-2011/2012 © Nobuyoshi Araki/Courtesy Taka Ishii Gallery

araki-08001.jpg 67 Retour arrière (67 Shooting Back), 2007/2008, collection privée, New York © Nobuyoshi Araki/Courtesy Taka Ishii Gallery

araki-18001.jpg Amour de KaoRi (KaoRi Love), 2007, peinture acrylique sur deux tirages noir et blanc, collection privée, New York © Nobuyoshi Araki/eyesencia