AMERICAINES ET EUROPEENNES, EN ROUTE VERS L’INCONNU

AMERICAINES ET EUROPEENNES, EN ROUTE VERS L'INCONNU

Il y a quelque chose de troublant dans les souliers de Mansur Gavriel, duo de créatrices (Rachel Mansur, et Floriana Gavriel), basé aux Etats Unis. Tout dans leur ascension marquée par des teintes douces, presque cosmétiques, appelle à revoir nos classiques… L'actualité parisienne de la marque créée il y a moins de 4 ans, est liée à son nouveau corner au Bon Marché, à Paris.  Petits talons, couleurs vives mais pastellisées, neutres sans être fades, robustes sans être virils, tout nous dit que ces souliers chaussent des femmes aisées, de celles dont le corps élancé par le sport, ne tolère aucune surelévation trop voyante. Aux Etats Unis, rien ne semble plus compter que la distance qu'il faut pour rejoindre un point à un autre. En voyant cette image, présentée sous la forme d'une vitrine, voire d'un herbier de souliers, je repense à Drieu la Rochelle, à ce petit texte "Américaines et Européennes", paru dans les Cahiers de l'Herne, en 1982. "C'est en vain qu'elles courent après l'amour, fantôme européen, de Londres à Venise. Elles ne le connaissent pas, ce n'est point par innocence, mais par dessèchement. Elles sont égoïstes, mais ce sont des égoïstes qui n'ont pas appris à jouir de la vie". Ce pourraient être les escarpins de campagne d'Hillary, et  de toutes celles qui ces temps ci avancent sans savoir exactement sur quel pied danser. Bien sûr, toujours droites dans leurs souliers dont le bout arrondi, les formes bien sages, les nuances de blush, de pain sans gluten et de lavande bio  contrastent avec celles d Madame Trump, crinière blonde en feu et sourire immobile de celle qui, dressée sur ses 18 cm, espère la victoire comme une possibilité nouvelle de posture.

Gavriel Mansur, au Bon Marché. wwwlebonmarché.com 

Pierre Drieu la Rochelle, l'Herne, 1982, p 65, 66, 77.