Les vêtements griffés de Rachida Dati

Certains disaient qu'elle était l'atout chic et féminin du gouvernement Fillon. Cécilia Sarkozy, ex-première dame, déclarait à son propos : "Elle est de la race des seigneurs". Elégante, photogénique, l'ancienne garde des Sceaux était la ministre la mieux habillée. Ou du moins, la mieux achalandée question griffes. La fashionista Rachida Dati a incarné l'ère bling-bling du président Sarkozy, en affichant clairement son goût pour le luxe. "Un tourbillon de robes haute couture, d'escarpins et de diamants", remarque Valérie Domain dans son livre Total look. Un style vestimentaire qui n'a jamais autant été l'objet de gloses, décryptages et autres critiques pour une ministre.

Elle a du goût et tout lui va bien, c’est incontestable. L’ancienne ministre de la Justice, de 2007 à 2009, a connu une ascension politique fulgurante, symbole à la fois du sarkozysme, elle était la porte-parole de Nicolas Sarkozy durant la campagne de 2007, et de la diversité, première femme d’origine maghrébine et musulmane à occuper un ministère régalien. L’actuelle députée européenne et maire du 7e arrondissement de Paris a marqué les esprits lors de son entrée au gouvernement.
« Toute petite, confie-t-elle à Paris Match, j’ai eu le goût d’être bien habillé. C’est une question de correction à l’égard des autres. Maman me l’a enseigné. (…) Mes tenues n’ont rien de branché. Elles sont classiques. Tous mes tee-shirts Autre ton viennent de Monoprix. Comme maman le disait: « Ce n’est pas le vêtement qui compte, c’est le cintre ». On m’a toujours félicitée sur mon élégance. »
Souvent griffée Dior, la ministre se dote d’un joli budget au ministère de la Justice pour frais de représentation: 300 000 euros. Elle a également porté un collier Chaumet à 13 000 euros pour visiter un centre de détention. « Je n’ai jamais voulu renoncer à ma féminité, déclare-t-elle en 2009. Ce n’est pas incompatible avec la compétence ! Je ne veux pas changer. »
La cour de l’Elysée n’est pas un catwalk
« Je n’ai jamais compris les reproches qui ont été faits à Rachida Dati », s’étonne Annie Mollard-Desfour, présidente du centre français de la couleur. « On lui reprochait d’être extrêmement féminine, mais n’y avait-il pas autre chose derrière cela ? Bien d’autres femmes politiques portent des vêtements de marques et des bijoux coûteux. »
Derrière ces critiques, ce sont bien ses compétences qui étaient mises en doute, l’authenticité de ses diplômes n’étant pas avérée. Rachida Dati a par ailleurs souvent été décriée pour son manque de sérieux et ses nombreuses gaffes.
« La cour de l’Elysée n’est pas un catwalk, affirme Valérie Domain. Il est difficilement acceptable pour une ministre de se comporter comme une mannequine. » La journaliste et auteur dénonce ici un problème de tact et de savoir-vivre. « Dans l’absolu, on devrait pouvoir s’habiller comme on le souhaite mais on vit en société, et le respect de l’autre entre en compte. Surtout lorsque l’on est ministre et que le pays rencontre des difficultés économiques. »
Le retour de la sobriété
Temps de crise oblige, il a été très vite reproché à Rachida Dati d’étaler ses richesses. « En France, les signes extérieurs et ostentatoires de prospérité sont mal perçus, analyse Frédéric Godart, sociologue et enseignant à l’Insead de Fontainebleau. Bien que si l’on regarde les prix des costumes des hommes politiques, beaucoup seraient très étonnés. » La norme est à la sobriété, un retour de l’austérité aussi bien économique que vestimentaire. « Des lunettes de soleil, même si elles ne coûtent pas chers, donnent un effet bling-bling. Ce qui compte, ce n’est pas la réalité, mais la perception que le public en a. »
Elle a compris la leçon. Les dernières apparitions de cette ancienne magistrate de 46 ans sont plus sobres, moins ostentatoires. Récemment, lors de son retour en grâce au sein de la majorité, ses bottines rouges à talons, dignes d’une Lady Gaga, ont encore fait jaser, mais cette fois, ce n’était pas des Louboutin, selon les dires de Rachida Dati. Elle apparaît même en jean et veste noire, une couleur passe-partout, « qui s’adapte à toutes les circonstances et peut avoir tous les rôles », ajoute Annie Mollard-Desfour. Elle s’était faite plus discrète, qui sait, pour peut-être mieux revenir.
Céline Hussonnois Alaya

Rachida Dati en couverture de Paris Match, 2007

Rachida Dati en une de Paris Match, 2010

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