SUR LES TRACES D’OPIUM A MARRAKECH

Jean Louis Sieuzac, le "nez", Jean Dinand, le créateur de l'écrin au pompon noir : une rencontre au musée Yves Saint Laurent de Marrakech. Là où le 8 et le 9 février, Yves Saint Laurent Beauté avait convié la presse beauté à fêter les 40 ans d'Opium, ce parfum à travers lequel Yves Saint Laurent, célébrait « l’amour fou, le coup de foudre, l’extase fatale ». La voix de son créateur surgit dans l’incandescence d’un poème retrouvé : « Je connais l’odeur du suint et du cuir, des palais et des temples l’odeur de toutes les épices, l’odeur de tous les aphrodisiaques et celle de la peau des femmes et celle de la peau des hommes. Je suis riche, riche incomparablement riche de ce que j’ai vécu » Cette richesse se trouve encore augmentée par la mémoire, les témoignages venus donner un autre éclairage, à ce chaud-froid mêlant les fleurs (jasmin, muguet), les fruits (mandarine) et les épices, posé sur un fond brûlant (baumes et patchouli). Qui a oublié l'inro de laque d'Opium "pour les femmes qui « s’adonnent à Yves Saint Laurent ». Opium a enfièvré les années soixante dix quatre vingt, ses nuits de chair et ses corps félins. Nul n'aurait pu imaginer que ce parfum culte est né d'un malentendu. Le flacon avait au départ été pensé par Pierre Dinand pour Kenzo qui redoutait les références trop ostensiblement japonaises pour le marché américain. C'est donc à Yves Saint Laurent qu'il propose l'écrin. Ce dernier lui dit : "C'est l'inro japonais dans lequel les samourais mettent leurs boules.. d'Opium". Le nom est trouvé... Et sous le nom de code "Ishi", le parfum va connaitre bien des péripéties avant son lancement par Squibb. Son président, fou furieux refuse de mettre sur le marché un tel produit ainsi conditionné. "I will never launch this plastic bottle of shit"... Quant au jus, un floriental dont les effluves ne sont pas sans rappeler Youth Dew, il est choisi après trois essais par Yves Saint Laurent lui même qui ne le trouve pas assez animal... C'est la première fois dans l'histoire qu'un parfum est aussi dosé. Reste bien sûr la campagne publicitaire, avec Helmut Newton et Jerry Hall, une séance mémorable dont Antoine Arnodin, fils de Maïmé Arnodin, alors à la tête de Mafia, a raconté toutes les étapes. Une série de polaroïds aurait été faite par le photographe, avec l'héroïne en train de se faire hara kiri. Images introuvables. Loin des tests produits, et de la consensuelle suite de déclinaisons auxquelles nous ont habitué les marques, Opium s'impose encore et toujours comme le parfum le plus "rupturiste" de l'histoire.

Opium