La boulimie cool

En ces temps agités, il y a un mot qui vous refroidit dès qu'on l'entend prononcé: cool. Cool, vous entendez? Lorsqu'on cherche à traduire cool en français, on obtient le plus souvent...cool. Cool, comme calme, rester calme. Cool donc. Il y a même des cours de cool. Parce que cool, c'est un mode de vie. C'est le lâcher prise à tous les étages. Et je vais vous en donner les bases.

Cool, c’est commencer par s’inscrire dans un cours de Kundalini Yoga, qui promet un « bain de sonorités surnaturelles de la lune et du kigonki pour une détente corporelle mentale et corporelle unique », rien que ça. Etre cool, c’est rêver à son tour d’un paradis bohème et healthy, dans une robe qui n’a nécessité aucun pesticide. Qu’importe si à Los Angeles, les actrices se font injecter du botox sous les aisselles pour ne plus transpirer en plein red carpet, qu’importe si les rhinoplasties, les lipposuccions s’y pratiquent à la pelle, c’est de ce côté du monde que le vent du cool souffle avec la force d’un ouragan. Être cool, ce serait ne plus manger de viande (beurk), siroter son smoothy vegan en parlant de la libération des identités, imaginer un dîner de Noël détoxiné: cool donc le repas caviar végétal, Chou-fleur truffe noire, Pavlova de Noël et glace à la fleur d’oranger. (Les Fêtes végétales, ici en photo). So chic. Le cool est transgénérationnel. Pour les plus « engagés », défendre la culture « diversitaire » contre la dictature blanche et hétéro. Dans les agences de mannequins, le profil en vogue, c’est plutôt la créature au sexe non identifié, issu de la communauté des minorités. Ce qui est extraordinaire c’est que le cool, derrière sa panoplie d’ alibis cool, -du yoga aux graines-, le frugalisme cool exerce sur nos contemporains une sorte de dictature: le nouvel ordre moral de la bonne conscience. Ne pas parler de sujets qui fâchent pour éviter toute tension, remplacer les romans par un bon feelgoodbook, parler aux arbres plutôt qu’à son voisin (après tout il est sûrement sexiste, sûrement néo-colonialiste.. ) Moi ça me fait un peu bondir ces rédactrices de mode qui trouvent que la cagoule c’est cool, c’est une tendance vraiment sympa pour l’hiver. Ce sont les mêmes qui tout en croyant défendre le multiculturalisme avec leurs gros sabots bio, s’enfoncent chaque jour dans ce que l’Europe peut produire de pire: la soumission à un nouvel ordre moral, la bien pensance. Et ça, c’est pas cool du tout.