Ulrich Lamsfuss:  »Ou que l’on aille, quelqu’un est venu avant. »

Sa démarche est toujours la même: il déniche des images dans la publicité, dans la presse, dans ses archives personnelles, qu’il reproduit méticuleusement, de façon hyperréaliste, à l’huile sur toile. Jeune artiste berlinois, Ulrich Lamsfuss dévoile une nouvelle série de peintures à la galerie Daniel Templon : des images a priori insignifiantes, quotidiennes, qu’il copie, pendant des mois, pour mieux se les approprier. Le temps de la consommation visuelle, vulgaire, s’oppose ainsi chez lui au temps de la réalisation, le temps de la réalité, à ses représentations. Interview.

Que disent ces nouvelles œuvres de vous-mêmes?
J’espère qu'elles ne disent rien du tout, parce que c’est justement cette qualité que j’aime le plus dans la peinture. Je fais des images, parce que je ne crois pas aux mots.

Pouvez-vous décrire une journée de travail? Je travaille tous les jours, de midi jusque tard dans la nuit. Le but étant de faire 6 à 10 heures de pure peinture par jour. Sinon, je ne pourrai pas garder un niveau de production satisfaisant. En ce moment, j’ai besoin d’au moins 10 heures pour terminer une petite œuvre. Les peintures plus grandes nécessitent trois mois de travail. Je suis complètement absorbé par le processus et par l’œuvre elle-même. Je commencer par peindre en haut à gauche, je termine en bas à droite. C’est ma façon de dessiner, presque ennuyeuse, sans aucune ambition. J’adore ça.

Votre dernier choc esthétique?
Je crois que c’était la techno, au début des années 90. Depuis, j’ai l’impression que, plus rien ne choque plus personne. Ou que j’aille, quelqu’un est venu avant. Il est difficile de construire quelque chose.

Vos obsessions? L’obsession est quelque chose de très étrange. Je ne me couperai jamais l’oreille. J’essaye au contraire d’avoir une vue calme et distante sur les choses. Plus que de l’obsession, il s’agit peut-être de passion. Je recherche l’honnêteté et la pertinence. "Unconcerned but not indifferent". (Détaché, mais pas indifférent, une phrase de Man Ray, ndlr)

Quel est votre rêve aujourd’hui?
L’indépendance, et la liberté.

Votre pire cauchemar?
Un monde rempli d’images médiocres. Un monde sans complexité, sans bizarre, sans alternatives. Un monde ou l’histoire se répéterait. Une farce.

Votre paradis?
Le paradis pour moi serait un endroit de possibilités et d’opportunités. Un endroit pour la réalité.

Propos recueillis par Karine Porret

Ulrich Lamsfuss, “Afternoons in Utopia”, jusqu’au 21 juillet 2012 à la galerie Daniel Templon, 30 rue Beaubourg, 75003 Paris. www.danieltemplon.com  

Ulrich Lamsfuss, « Dirk Hasskarl, Michel Houellebecq (2003) », 2010.
Courtesy Galerie Daniel Templon, Paris.

Ulrich Lamsfuss, « De Tienda (Kalender « Das Meer », Juni 2008, Edition Maritim) », 2012
Courtesy Galerie Daniel Templon, Paris.

Ulrich Lamsfuss, autoportrait.
Courtesy Galerie Daniel Templon, Paris.