Nathalie Arthaud, la candidate qui ne veut pas séduire
La candidate de Lutte ouvrière a été la première à déposer ses 500 parrainages d'élus, décrochant son césame pour entrer officiellement dans la course à l'Elysée. C'est la première fois que Nathalie Arthaud est candidate à l'élection présidentielle, à la tête du parti dirigé jusqu'en 2007 par Arlette Laguillier, six fois candidates. Mais à deux semaines du premier tour, elle plafonne à 1% d'intentions de vote. Décryptage d'une non communication politique.
« En règle générale, les politiques travaillent beaucoup leur apparence, qui envoie un message bien spécifique », explique Frédéric Godart, sociologue à l’Insead de Fontainebleau. « Les candidats font très attention à leur look, pour ne pas créer d’accroche négative », note Christian Delporte, historien de la communication politique.
Ce n’est pas le cas de la candidate de Lutte ouvrière. Ce que confirme Geneviève Reimeringer, collaboratrice de sa candidate et élue à Bagnolet. « Il n’y a pas de mise en scène de Nathalie Arthaud. Elle ne se place pas dans le même cirque que les autres politiques qui veulent plaire, paraître ». Elle l’assure, Lutte ouvrière n’a pas l’objectif de séduire. Les idées, en priorité.
Pour Frédéric Dosquet, auteur de « Marketing et communication politique : Théorie et pratique », tout est communication en politique: « l’électeur construit du sens à partir de multiples indices, comme la voix ou la tenue vestimentaire. Mais l’électorat de Nathalie Arthaud est davantage sensible au contenu qu’au packaging. C’est un parti de niche qui ne cherche pas à ratisser large ».
Faire vivre les idées
« Nous ne considérons pas que nous avons une communication politique, nous considérons que nous avons des idées, insiste Geneviève Reimeringer. La campagne, cela consiste à faire vivre les idées, ce n’est pas une question d’apparence ».
Pourtant Trotskiste, Nathalie Arthaud n’apparaît pas particulièrement en rouge. « C’est important la couleur en politique, cela permet d’être reconnu », analyse Annie Mollard-Desfour, linguiste-lexicographe au CNRS, qui remarque que Nathalie Arthaud ne parvient pas à se différencier des autres petits candidats, un tort à deux semaines du premier tour.
D’un point de vue vestimentaire, ce qui compte pour la candidate de Lutte ouvrière, c’est d’être à l’aise. « Même ça, c’est un combat pour les femmes », insiste Geneviève Reimeringer, qui dénonce les multiples entraves que l’on impose aux femmes. « Pouvoir s’habiller sans être coincé dans un modèle soi-disant féminin et sans adhérer aux normes de la société, c’est une victoire ».
« On voit les femmes avant de les écouter »
Un look qu’elle qualifie de sportif, « tout en étant féminin, ce qui n’est pas contradictoire ». Nathalie Arthaud est « naturelle, ne cherchant pas à jouer ». Car la véritable démocratie, selon elle, c’est « que les citoyens n’accordent par leur confiance à quelqu’un sur la base de l’apparence ».
Nathalie Arthaud n’est créditée que de 1% dans les sondages, bien loin derrière les 10% du Front de gauche du charismatique Jean-Luc Mélenchon. Handicapée par un déficit de notoriété ? « Les électeurs reconnaissent très bien Nathalie, répond Geneviève Reimeringer, car elle exprime les idées que l’on défend. Poserait-on la même question à un homme ? Cela fait partie de la façon dont on traite les femmes: on les voit avant de les écouter. Une manière de ne pas poser de questions sur ses idées. »
Céline Hussonnois Alaya